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Cette fille-là me fait envie. Elle n'a pas la même peau que moi, ça se voit qu'elle ne fume pas. C’est lisse et sans accrocs. Tu lui donnes dix ans de moins. Cette fille-là, c'est presque moi, sans les cernes. Elle me dit qu'elle baise un peu et je veux bien la croire, elle a l'air tellement saine, ça serait normal. Cette fille-là me fait envie quand elle me dit qu'elle ne boit pas, même pas du café et ça se voit à la couleur de ses dents si parfaitement blanches et alignées. Quelle chance elle a de pas connaître la vodka ! 

Cette fille-là n'est pas du genre à se laisser chercher des noises et pour ça aussi, je l'envie beaucoup. Ça doit être bien de pas se laisser emmerder. De pouvoir dire non quand on n’a pas envie. J'aimerais essayer un jour. Cette fille-là n'est pas très drôle et parfois même, carrément conne. Un peu comme moi en somme, surtout après trois whisky. 
Cette fille-là a des enfants. Bien habillés, toujours propres et jamais la morve au nez. Ils disent merci, bonjour, au revoir et ils ont plutôt intérêt à croire ce qu’elle en dit. Elle a aussi un mari qui porte son alliance à son gros doigt tellement boudiné qu'il ne peut plus, de toute façon, la retirer. Pis je crois qu'il n'aurait même pas intérêt d’essayer. 
Cette fille-là prépare les fêtes avec deux mois d'avance, a des amies plutôt fidèles et un petit chien, qu'elle brosse tous les samedis sous sa véranda achetée à crédit. J'aimerais avoir une vie aussi bien réglée que la sienne et des amies au garde-à-vous. Mes chiens à moi ont le poil court et font le dos rond dés que j’approche, ils flippent je crois. Surtout après trois Ricard. 
Cette fille-là, je ne l’ai jamais invitée chez moi et c'est pas dit que ça arrive. Faudrait pour ça que je me mette à sucer de la glace et rien que de la glace et ça, pour sûr, j'en n’ai pas trop envie. Ça a l’air d’être tellement l’emmerde, la vie à côté d’elle, que même pour une soirée, j’ai pas envie de tester. 
Alors pour pas lui ressembler, je bois. Dés le matin, à vide, comme ça, le ventre même pas plein. Je bois. Tout ce qui me passe sous la main termine dans mon estomac. Je bois. Paraît que c'est mauvais pour la santé, paraît que je vieillirai pas, paraît que je finirai toute seule. Avec mes chicots pourris par le tabac et le café et mon foie dur comme celui de papy qu'est mort tout jaune comme un poussin.
Cette fille-là, le bol qu’elle a, c’est de pas avoir eu de poivrots dans sa famille. De pas avoir vécu de traumas si lourds à porter qu’il faut pour ça se fracasser le crâne tous les soirs pour arriver à plus penser à rien. Il lui suffit d’allumer la télé, de boire une infusion, d’éplucher sa petite pomme bio et de la gober. Elle ne se pose aucune question, elle ne sait même pas si la vie qu’elle mène et celle dont elle avait rêvé. Elle ne sait même pas si elle avait rêvé un jour de mener une vie en particulier. Peut-être que pour elle se faire épouser et pondre deux mômes suffit à l’idée qu’elle se fait du bonheur. Peut-être qu’elle a épousé le premier con qui l’a demandée en mariage. Peut-être qu’elle avait peur que ça n’arrive pas une seconde fois. Peut-être que certains se posent trop de questions et d’autres pas assez. Et peut-être que je devrais arrêter de fréquenter des filles comme ça. Des filles qui l’air de rien me ressemblent si peu.

 

My Dear-Ex, en une seule phrase.

 

Je vous hais je vous hais je vous hais on dit que l'amour n'est pas si éloigné de la haine et pourtant je vous hais de toutes mes forces obscures, de toutes mes sueurs nocturnes et aussi de toutes mes peurs diurnes je vous hais si fort et je sais qu'on est très loin très très loin de l'amour parce que que je n'ai pas autant envie d'arracher les couilles de mon nouveau mari avec mes mains pas envie non plus de lui cracher à la gueule avec autant d'impétuosité ni avec rien du tout d'ailleurs ni de lui défoncer le crâne à coups de hache ni de lui arracher la langue et les yeux et d'enfoncer tout ça dans le cul d'un petit veau tout mignon c'est faux l'amour et la haine n'ont rien à voir rien à voir du tout et si mon cœur bat quand je vous vois ne vous méprenez pas c'est juste l'angoisse qui monte de ne pas retenir mes bras pour vous tuer à chaque fois.

Anti-Valentin mon Amour ! 


J’ai oublié le goût qu’avait ta bouche sur la mienne
Et le temps que je passais à suçoter mes lèvres après tes départs
Et le bien que ça faisait d’attendre tes retours 
maintenant que je les appréhende
J’ai oublié les frissons quand tu baisais ma nuque 
Et les mouvements de désir de nos corps enlacés
Et comme je convulsais quand tu te retirais
Et comme j’avais envie de tout recommencer.
J’ai oublié d’écrire sur les listes que je dresse 
Penser à te plaire, à tout prix, 
Penser à t’aimer, malgré tout, 
Penser à t’acheter, des douceurs, 
Penser à nous sauver, de tout. 
Alors ce fils qui franchit la porte, 
Heureux de ce poème, de se sentir aimé, 
Pour la première fois,
Que vais-je pouvoir lui dire ? 
Que vais-je lui conseiller ? 
Lui qui chante son bonheur,
Lui qui croit que ça existe,
L’amour.
Je vais devoir simuler, 
Comme depuis des années.
Lui dire que oui, l’amour subsiste, 
Oui ! L’amour résiste ! 
Au temps qui passe
Aux ennuis qui demeurent
Je vais lui dire de garder ce billet, 
Le plus longtemps possible, 
Et de le relire, à chaque fois 
Qu’un doute s’insérera 
Dans chaque parcelle de sa tête, 
Dans chaque pore de sa peau,  
Ce billet, c’est la preuve, mon chéri
Que l’amour a existé, un jour
Dans ta vie, qu’il a réussi à s’y insérer
Mais c’est aussi la preuve,
Qu’on devrait toujours avoir dix ans, 
Et qu’on ne devrait pas s’user
Dans de sales draps, 
Que la vie se charge de tout, 
Et que c’est une chose merveilleuse
Que contrairement à l’amour, 
L’éternité n’existe pas.

 

L'amour à l'assiette...

J’aime pas les gens qui disent je t’aime puis qui, l’instant d’après, s’en vont. On n’est pas obligé de s’aimer une vie entière mais, l’instant d’après, c’est un peu court. 


J’aime pas les gens qui meurent avant de leur avoir dit je t’aime. On n’est pas obligé de se le dire mille fois, mais juste une fois, c’est bien déjà.


J’aime pas les gens qui n’aiment pas qu’on les aime et qui font tout pour démonter chaque jour chaque preuve d’amour donnée.

J'aime pas les gens qui m'aiment parce que j'ai peur toujours qu'ils trouvent un jour mieux ailleurs. 


J'aime pas les gens compliqués qui avancent qui reculent de coté et en virgule. 


J'aime pas m'arrêter là mais je crois que j'en ai trop dit déjà.

 

 

 

 

 

 

En lambeaux d'émoi. 



Elle s'était fait tatouer un petit truc très mignon sur les côtes, à une époque où elle croyait fort en ses rêves. Un surtout. Cette petite conne avait enfin écrit son foutu roman. Vingt ans qu'elle bassinait tout le monde avec cette histoire. Elle s'était plongée dedans comme on descend dans les profondeurs, en apnée. Une année sans respirer, à pourrir son entourage. Après ça, quand enfin le mot fin a été posé, elle avait même trouvé un éditeur et tout semblait bien parti. Vraiment très bien parti même. Alors, comme pour faire que son personnage vive encore auprès elle, le plus longtemps possible, elle avait fait tatouer son prénom sur ses côtes, là où la douleur est sublimement insupportable. Pour une raison qui lui échappe, le bouquin n'a pas trouvé son public. C’était pourtant un beau roman, c’est en tout cas ce qu’elle croyait. La voilà maintenant complètement tordue, dans une pose tarabiscotée, à souffrir le martyr, comme une année plus tôt, en pire. Mais petite conne, la critique est unanime. Et la douleur d’être boudée plus atroce encore que la lame du cutter qu’elle enfonce dans sa chair et qui, lambeaux de peau par lambeaux de peau, efface à tout jamais le prénom de l’adorée.

La putain, le Saint et le polichinelle. 
(et bientôt mes titres seront plus longs que mes textes. Amen)
 
Mon amour est mort et à ses funérailles, je n’ai pas été conviée. Il était déjà sous terre quand la nouvelle est tombée. Je n’en veux à personne. Je n’y avais de toute façon pas ma place. Je n’aurais pu tenir le bras de personne et assurément, personne n’aurait tenu le mien. J’ai aimé Anton, c’est comme cela qu’il s’appelait, je l’ai aimé comme personne. J’ai résisté aux attaques, aux sobriquets dont toutes ces années on m’a affublée. J’ai été la salope. La chienne. La détestable. La putain et lui le Saint, mais ça ne faisait rien. J’ai aimé le mari d’une autre et c’est dans mes bras, dans mes draps qu’il aimait lui aussi, plus fort qu’ailleurs. J’ai eu mal quand il est devenu père, une fois, puis deux, mais j’essayais de ne pas y penser pour que rien n’entache mon amour pour lui. Puisque c’est ailleurs qu’il vivait et que je n’y étais pour rien. Jamais je n’ai demandé et exigé encore moins qu’il ne quitte sa légitime épouse. Jamais je n’en ai eu l’envie, désireuse de demeurer l’épouse de personne. Pourtant ce matin je ne suis ni veuve ni putain et épouse encore moins. Au réveil, sur le petit boitier sur lequel je viens d’uriner, il y a une croix bleue. Une belle et franche et stricte croix bleue posée solennellement sur le journal ouvert à la rubrique nécrologique. Les vies sont des pas chassés pour ceux qui ne savent pas danser et dans la cuvette des toilettes, je pleure. Je tiens, d’une main mon ventre et de l’autre mes cheveux et mes larmes à la bile se mêlent. C’est ma vie qu’accroupie je vomis.

 

 

Ils sont partis le 31, sans penser à arracher la dernière page du calendrier. Ils sont partis le 31 et ils avaient encore tant à faire, les mois prochains, entre les rendez-vous de juin et les anniversaires, jusqu'à septembre, cumulés. Ils sont partis, tout content, vraiment, de pouvoir enfin et sans rien dire à personne, partir puis revenir demain, le mois prochain. Ils n'ont mis dans le coffre que de quoi se changer au petit matin plus un maillot propre, pour chacun. Maman a glissé dans son sac un litre de lait pour le petit-déjeuner et quelques bières pour leur soirée. Les enfants vont rater l'école, ils étaient sacrément contents. Sacrement contents, ça oui ! Pour une fois que maman dit oui ! Ils ont bu leur café, vite fait, ils étaient tous tellement tellement pressés d'enfin se casser ! Ils n'ont pensé à rien. Ni à donner des croquettes au chat. Ni à laver les tasses du petit-déjeuner. La petite, a-t'elle tiré la chasse d'eau ? Ont-ils posté le chèque pour le règlement de la cantine ? Enclenchés le bouton du répondeur ? As-tu fermé le gaz ? Ma Chérie, ça fait dix fois que je te le répète, on n'a pas le gaz ! Ils roulent depuis vingt-six minutes, ils ne sont pas si loin de la maison. Elle cogite. Elle est certaine d'avoir oublié quelque chose. C'est toujours comme ça quand on part un peu trop vite. On voudrait sans cesse revenir sur ses pas et retarder ses départs. Ils sont partis le 31, ils pensaient revenir demain. Ils n'avaient pensé à rien. Pas même à arracher la page du calendrier. C'est à cause de maman, elle disait que ça portait malheur de vouloir avancer le temps et qu'à chaque jour suffit sa peine. Ils sont partis le 31 sans penser que demain peut-être n'existera pas.

 

 

 

Assieds-toi. 

 

Nos projets prè-cancer qui s’évaporent post-chimio et nos prières qui accompagnent nos mains croisées qui elles implorent ta guérison.Le refus, le refus de croire, d’entendre qu’il faut repartir au combat.

C’est si doux la trêve.

Je ne veux pas croire qu’il faut déjà se lever, on vient à peine de s’asseoir.

Regarde, il fait beau et si chaud. C’est essoufflée que tu veux à nouveau livrer bataille ?

Attends encore un peu. Laisse passer l’été. 

Comment ça, c’est pas toi qui décide ?

Mais ce cancer, il était tout petit. 

Tout petit ça veut rien dire ! Ah bon ? Mince, je croyais, j’espérais moi.

Non, je ne suis pas prête.

Attends encore.

Comment ça tu iras toute seule ?

Mais non, mais non, on vient avec toi ! Tu n’iras nulle part sans nous.

Mais attends ! Attends j’ai dit !

Tiens, prends donc ma main, et puis celles-là aussi.

Mais si, je t’assure, plusieurs ce n’est pas de trop. J’ai de l’énergie moi, je pèse facile vingt kilos de plus que toi. Allez, regarde, à nous trois, on fait huit fois ton poids. 

Les combats ne se gagnent qu’en livrant bataille ! 

Tu te fous de ma gueule ? C’est de qui cette connerie ? J’ai dit ça moi ? Mais je parlais pas de ça bordel !

Allez allez, assieds-toi là, sois mignonne, pose-toi un peu.

Tu sais, j’ai pleuré ce matin, c’est la première fois depuis que je sais. Je n’avais pas réalisé je crois et puis là, paf, en pleine gueule. Pardonne-moi. Je voudrais te dire que je suis là et qu’il n’y a pas que moi. J’ai écrit sur toi, je t’ai rendue immortelle, dans mon roman, mais c’est pas une raison hein, tu sais. C’est pas une raison du tout même. Si tu déconnes, je fais brûler tous les exemplaires et je te préviens, je déconne pas ! 

S’il te plaît. 

Allez.

Déconne pas. 

Mes genoux sont assez cagneux pour que j’implore sans avoir mal.

Et quand bien même hein. Quand bien même. Ça serait pas la pire douleur.

Vivement septembre. 

 

Je n'ai confiance en personne en personne comme en toi et il n'y a au monde rien de plus vrai et de plus beau que cette absolue vérité qui pour certains sonne faux et pourtant non. 

Voilà ce que j'aurais voulu te dire ou même t'écrire si j'en avais eu le temps le droit le courage ou quelque chose d'autre ou quelque chose comme ça en vrai je ne sais pas. 

Mais je n’ai pas osé et pire je me suis retenue et j'ai laissé la place et me suis contentée du peu de ce que les autres avaient à me donner. 

Me voilà à présent bloquée coincée enclavée dans une vie où par l'écran je regarde la tienne et tu fais, comme moi, semblant, je le sais, mens aux autres mais pas à moi.

Car je n'ai pas osé et je suis condamnée à regarder tes pieds ainsi que ceux de ta dulcinée ne souffrant visiblement d’aucune callosité.

Amoureux enlacés au bord de je sais pas quelle plage et il a l'air de faire sacrément chaud car sur vos peaux je vois du sable et de la sueur et la sueur permet au sable de rester collé à vos peaux.

Comme vos sourires. 

Vos putains de sourires de connards heureux. 

Et je hais l'été. 

Ainsi que l'amour. 

Et la vie aussi. 

Et je hais les putains de comptes en banque qu’il faut remplir avant de prendre les autoroutes

Dans un sens et quinze jours après et autant de nuits dans l’autre. 

La seule chose qui me console c’est que vos regards semblent si vides qu’il sera finalement plus facile de savoir de quoi vous êtes morts 

Que de quoi vous avez vécu. 

Bien à vous, 

Je vous hais, 

Tant qu’à faire. 

Ils ont perdu leur leader
Celui qui se défonçait pour eux
Et puis avec eux aussi tant qu'à bien faire
Les choses jusqu'au bout sinon ça sert à rien de les commencer. 
Ils ont perdu leur leader, 
Celui qui se bougeait pour eux, 
Le cul, les bras, la tête, il agitait tout ça, au milieu de la voie publique ou pas, il s'en foutait, c'était lui le leader. 
Le boss. 
Le crack. 
Celui que personne du regard n'osait défier. 
Ils ont perdu leur leader et maintenant voilà que tout le monde pleure, 
Il est tombé comme ça, 
BAM
Raide au milieu de cette même voie publique 
Là où la veille le guet il faisait.
Leurs casquettes dévissées sur leurs rasés de crânes, de près, leur leader ils le pleurent. 
C'est la première fois qu'ils perdent quelqu'un. Ils sont jeunes. C'est normal. Ils vont apprendre que la mort n'a pas d'heure.
Elle frappe aux portes. 
Elle tabasse, poings serrés elle n'y va pas de main morte, elle défonce, elle enfonce, comme après les poings des vivants dans la terre. 
Ils ont perdu leur leader, ils l'enterrent tout à l'heure, la mort n'a pas d'heure, c'est une veille de week-end, elle s'en tape, elle n'a pas terminé sa semaine, elle. 
Cette après-midi. 
Cette nuit. 
Demain. 
Elle a du taf, elle n'arrête pas, jamais. 
Mardi leur leader est tombé, 
Devant leurs yeux à tous et ils n'ont rien pu faire. 
Mercredi c'était fini. 
Vendredi ils l'enterrent, leur leader. 
Et cette pensée, cette pensée qui ne les quittera jamais.
Celle de commencer une semaine, une putain de semaine avec quelqu'un et la finir sans. 
La finir sans lui. 
Finir le mois sans lui. 
Puis l'année. 
Puis une vie. 
Une vie toute entière, c'est long quand il y manque quelqu'un. 
Ils ont perdu, 
Dis-leur, 
Dis-leur, qu'ils ont perdu
Leur leader.

 

Cher Absent, 


Tu aurais eu quarante ans cette année, le 17 novembre. C'est un bel âge, quarante ans. J'en ai trente-cinq, je n'en suis plus loin même si je t'ai déjà rattrapé depuis un trop gros paquet d'années. Ta maman est décédée il y a quelques mois déjà. Du coup, te voilà quelque part, ton père ta mère et toi et moi je reste en bas. 
Des photos que je regarde de cette époque-là, vous êtes tous morts. Tous. C'est étrange de se dire ça. Nous étions jeunes pourtant. C'est étrange et il n'y a plus que moi. Du coup, tu dois avoir retrouvé des potes aussi. Des potes et ta famille et moi je reste en bas. 


Je me demande si Steph mange toujours des graines de tournesols et s'il en fout partout. Et si quelqu'un râle après lui. Quelqu'un d'autre que moi, puisque je reste en bas. 


Demain c'est dimanche et je n'ai rien de prévu. Peut-être que cette nuit, je vais mourir. Juste quelques heures, ne t'inquiète pas. Je vais passer, t'embrasser, te souviens-tu du goût de nos baisers ? De ma salive dans ta bouche, de la tienne dans la mienne, moi je me rappelle. Je me souviens de ton corps aussi mais pas de ceux qui après toi sont passés. C'est étrange comme les corps des autres ne m'ont pas marquée, pas comme le tien en tout cas. Je me réjouis à l'avance de savoir que cette nuit, je vais le retrouver. Personne ne s'en rendra compte. On change d'heure. À trois heures je partirai et quand je reviendrai, il sera encore trois heures. Tu vois, je suis futée. Personne ne réalisera, je te dis. On aura une heure. Une heure juste toi et moi. Et même si je partais plus longtemps, ça ne changerait pas grand chose va. 


Je crois que tout ce qu'on peut dire à ce sujet, c'est rien que des conneries. Je crois que ça n'existe que pour cette raison. Le changement à l'heure d'hiver. Une fois par an, pendant une heure et le temps n'existe plus. On peut aller, venir, partir et retourner. On peut s'éteindre vite ou doucement. On a une heure. Une heure devant soi plutôt que la vie tout entière. C'est mieux que rien. Selon qu'on se contente d'un bonheur imparfait plutôt que d'un amour impossible. Selon qu'on a le choix ou pas.

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